6 juil. 2006

Etape 14 - Panguish/Escalante - 111 km


Journée entamée par un gigantesque petit-déjeuner.
Nous prenons la route de Bryce Canyon, le goudron roulant et la vue fantastique allège nos jambes.
Nous filons rapidement vers le Visitor Center. Il y a 6 miles aller/retour pour le canyon. Nous choisissons d'emprunter la navette du parc pour notre visite.
Nous sommes émerveillés par la découpe du canyon et les couleurs rouge orangé.
Hélas, le retour en navette nous est fatal. Nous nous endormons sur les banquettes, tels des nouveau-nés.
La fatigue des 2 semaines de vélo a fait son oeuvre... La situation est drôle :
- un car rempli de touristes avec leurs beaux shorts, sandales, casquettes Mickey, appareils photo en bandoulière ;
- nous 5, en cuissards sales, le visage tiré par la fatigue et le soleil, endormis au fond du car, étalés sur 10 places. Mais personne n'ose nous déranger...
Nous reprenons notre chemin et déjeunons dans un market de bord de route.
Le vent de face oblige les gros rouleurs (François et Benat), surnommés les « Grégarios » à se mettre au travail.
Ils se relaient régulièrement et nous nous abritons derrière eux. C'est du bon boulot !
Tout à coup, une côte. Breton (Duclos-Lassalle), lance une attaque et fait exploser le peloton. Je me lance à sa poursuite...
Déjà que c'est dur, mais en plus nous entamons notre jeu désormais habituel : la course et sa victoire d'étape à la clé...
Au détour d'un virage, nous nous calmons. Cette première côte qui paraissait tout à fait domptable se révèle être un mur !!
Des pentes à 12 % que nous avalons tant bien que mal.
Wandsel, « l'aigle de Capdenac », franchit le col en tête après une belle bagarre. Breton bien que lâché, monte par fierté le mur avec un énorme braquet. Nous arrivons finalement tous au sommet.
Dans la descente, les « Grégarios » de nouveau mènent un train d'enfer qui nous fait plier. Wandsel les suit.
Benat paie les efforts du jour et laisse François s'expliquer avec Wandsel dans les derniers kilomètres. Breton et moi, nous suivons à 5 minutes mais parvenons à voir quelques fois la bagarre de l'arrière lors de longues lignes droites.
Mais soudain, c'est la tuile : un rayon de la roue arrière de François explose littéralement. Faut dire qu'il a des cuisses de Boeing 747... avec les forces en jeu à cette allure, la roue se met instantanément en 8.
Coup de froid sur le peloton.
Plus un mot, la mine basse, nous sommes tous arrêtés sur la route à contempler cette roue tordue. Nous sommes au beau milieu de l'Utah, le magasin de vélo le plus proche se trouve à Moab, à 300 km, et ce n'est pas sur notre parcours.
Il reste 6 jours de vélo. Que faire ?
Pour l'instant manger... heu non, on va finir l'étape (2 km) et on avisera à Escalante (100 habitants).
Nous entrons en ville. C'est joli, mais mort.
Heureusement, le principal commerce de la ville est un magasin de montagne, bar, café internet, épicerie, photographe, restaurant, et en plus il loue des espaces pour planter la tente.
C'est tout bon pour ce soir !! Mais la roue ? François ne parle plus...
Le patron très commerçant tente d'appeler ces collègues cyclistes dans les villages voisins... en vain.
Une solution nous dit-il : « Allez voir le Desert Doctor ! » Il peut tout réparer.
Qui ? Hein ? Quoi ?
Pendant que nous montons le camp, Breton et François s'en vont voir ce fameux chaman...
1/2 h plus tard, ils reviennent souriants : « C'est incroyable ce mec. Il va nous réparer la roue en 1 heure !! »
Après moult questions, nous apprenons que le fameux Desert Doctor est une légende locale, aux allures de hells angels tatoué, il est le « Môssieur bricole tout » de la région. Fort de 40 ans d'expérience en démontage et remontage de Harley Davidson, Indian, Buel et autres motos américaines, pour lui, bricoler la roue d'un vulgaire vélo est un jeu d'enfant...
Tout souriants, nous partons boire des bières, nous sommes soulagés. 6 pichets plus tard, nous récupérons la roue, le rayon recollé, la jante dévoilée, mais ... le pignon bouge terriblement !!!
Le fameux Doctor n'a rien pu faire là-dessus. C'est mort. C'est de nouveau la grise mine.
La roue tiendra 1 jour, 2 peut-être, mais sûrement pas 6 jours.
Pfffffff nous nous couchons soucieux.
Ce soir-là, nous nous endormirons qu'au bout de 5 minutes... au lieu de 2 habituellement...

La roue tiendra-t-elle jusqu'au bout ? Nous sommes coincés au milieu de l'Utah, sans voiture, le prochain village est à 100 km. La situation devient tendue...






Etape 13 - Campground Cedar City/Panguish - 80km

Réveil 6 h.
Comme nous en avons pris maintenant l'habitude, nous plions le campement, puis nous déjeunons. Nous voilà en selle.
Il nous reste 1000 m de dénivelé pour franchir le col situé à plus de 3200 m d'altitude.
La pente est raide !
Quelques miles après le campground, nous découvrons le début du plateau du Colorado et ses immenses forêts ainsi que ses profonds canyons.
Aux 3/4 du sommet, nous apercevons le Parc national de Zion et ses falaises abruptes.
Après 2 h de montée, nous arrivons enfin au sommet de Cedar Breaks. Le plateau est magique. Nous longeons un point de vue sur une corniche qui ressemble à si méprendre au célèbre Bryce Canyon. C'est un avant-goût de ce que nous découvrirons par la suite...
Le paysage est si grandiose que notre moyenne en prend un coup à cause des nombreuses pauses photos. Nous paraissons petits par rapport à ses immenses amphithéâtres naturels et ses colonnes de roches rouges dressées .
La fatigue avec l'altitude (3300 m) et les interminables petites bosses sur le plateau usent le peloton essouflé rapidement, la faim se fait sentir...
Vers 10 h, nous arrivons enfin au lac qui se trouve à mi-pente de la descente.
Nous nous restaurons enfin dans une petite épicerie aux allures de saloon. Le patron est un boiteux du type trappeur bourru, la bouche édentée mais pleine de chique, et une barbe avec les restes des 6 derniers repas.
Notre menu, quant à lui, ne varie guère. Ça commence d’ailleurs à nous lasser : beans en boite froids et tortillas. Seule fantaisie apportée : un paquet de chips et guacamole, épinards en conserve, du chocolat en barre, du Coca, le tout consommé dans un ordre aléatoire, suivant ce qui passe sous nos doigts. Ça ne ressemble plus à rien.
Une fois le ventre plein, nous hésitons à nous baigner dans l'eau du lac tant attendu la veille. Après une courte hésitation, nous nous jetons à l'eau. Top !
11 h, s'ensuit une longue descente vers Panguish. Sprint final habituel.
12 h, nous voilà en ville. Le programme est de se restaurer puis de repartir vers un campground à 20 km de là.
La digestion faisant son effet, avachis sur les canapés en sky rouge d'un bar de station-service, nous craquons après seulement 80 km et décidons de rester sur place. Nous sommes envoûtés par l'ombre du camping local et sa piscine qui nous tend les bras.
Cet après-midi sera donc fait de repos après une matinée à plus de 3000 m. Les corps sont usés.
Panguish (Utah) : petite ville américaine typique sans aucun intérêt. Exceptée la piscine du camping qui nous retape.
Aujourd'hui, petite étape. Aurais-je enfin la chance de voir la nuit et les étoiles ce soir ?
20 h 30, nous ronflons déjà dans nos duvets, et le soleil brille toujours...