Etape 14 - Panguish/Escalante - 111 km


Journée entamée par un gigantesque petit-déjeuner.
Nous prenons la route de Bryce Canyon, le goudron roulant et la vue fantastique allège nos jambes.
Nous filons rapidement vers le Visitor Center. Il y a 6 miles aller/retour pour le canyon. Nous choisissons d'emprunter la navette du parc pour notre visite.
Nous sommes émerveillés par la découpe du canyon et les couleurs rouge orangé.
Hélas, le retour en navette nous est fatal. Nous nous endormons sur les banquettes, tels des nouveau-nés.
La fatigue des 2 semaines de vélo a fait son oeuvre... La situation est drôle :
- un car rempli de touristes avec leurs beaux shorts, sandales, casquettes Mickey, appareils photo en bandoulière ;
- nous 5, en cuissards sales, le visage tiré par la fatigue et le soleil, endormis au fond du car, étalés sur 10 places. Mais personne n'ose nous déranger...
Nous reprenons notre chemin et déjeunons dans un market de bord de route.
Le vent de face oblige les gros rouleurs (François et Benat), surnommés les « Grégarios » à se mettre au travail.
Ils se relaient régulièrement et nous nous abritons derrière eux. C'est du bon boulot !
Tout à coup, une côte. Breton (Duclos-Lassalle), lance une attaque et fait exploser le peloton. Je me lance à sa poursuite...
Déjà que c'est dur, mais en plus nous entamons notre jeu désormais habituel : la course et sa victoire d'étape à la clé...
Au détour d'un virage, nous nous calmons. Cette première côte qui paraissait tout à fait domptable se révèle être un mur !!
Des pentes à 12 % que nous avalons tant bien que mal.
Wandsel, « l'aigle de Capdenac », franchit le col en tête après une belle bagarre. Breton bien que lâché, monte par fierté le mur avec un énorme braquet. Nous arrivons finalement tous au sommet.
Dans la descente, les « Grégarios » de nouveau mènent un train d'enfer qui nous fait plier. Wandsel les suit.
Benat paie les efforts du jour et laisse François s'expliquer avec Wandsel dans les derniers kilomètres. Breton et moi, nous suivons à 5 minutes mais parvenons à voir quelques fois la bagarre de l'arrière lors de longues lignes droites.
Mais soudain, c'est la tuile : un rayon de la roue arrière de François explose littéralement. Faut dire qu'il a des cuisses de Boeing 747... avec les forces en jeu à cette allure, la roue se met instantanément en 8.
Coup de froid sur le peloton.
Plus un mot, la mine basse, nous sommes tous arrêtés sur la route à contempler cette roue tordue. Nous sommes au beau milieu de l'Utah, le magasin de vélo le plus proche se trouve à Moab, à 300 km, et ce n'est pas sur notre parcours.
Il reste 6 jours de vélo. Que faire ?
Pour l'instant manger... heu non, on va finir l'étape (2 km) et on avisera à Escalante (100 habitants).
Nous entrons en ville. C'est joli, mais mort.
Heureusement, le principal commerce de la ville est un magasin de montagne, bar, café internet, épicerie, photographe, restaurant, et en plus il loue des espaces pour planter la tente.
C'est tout bon pour ce soir !! Mais la roue ? François ne parle plus...
Le patron très commerçant tente d'appeler ces collègues cyclistes dans les villages voisins... en vain.
Une solution nous dit-il : « Allez voir le Desert Doctor ! » Il peut tout réparer.
Qui ? Hein ? Quoi ?
Pendant que nous montons le camp, Breton et François s'en vont voir ce fameux chaman...
1/2 h plus tard, ils reviennent souriants : « C'est incroyable ce mec. Il va nous réparer la roue en 1 heure !! »
Après moult questions, nous apprenons que le fameux Desert Doctor est une légende locale, aux allures de hells angels tatoué, il est le « Môssieur bricole tout » de la région. Fort de 40 ans d'expérience en démontage et remontage de Harley Davidson, Indian, Buel et autres motos américaines, pour lui, bricoler la roue d'un vulgaire vélo est un jeu d'enfant...
Tout souriants, nous partons boire des bières, nous sommes soulagés. 6 pichets plus tard, nous récupérons la roue, le rayon recollé, la jante dévoilée, mais ... le pignon bouge terriblement !!!
Le fameux Doctor n'a rien pu faire là-dessus. C'est mort. C'est de nouveau la grise mine.
La roue tiendra 1 jour, 2 peut-être, mais sûrement pas 6 jours.
Pfffffff nous nous couchons soucieux.
Ce soir-là, nous nous endormirons qu'au bout de 5 minutes... au lieu de 2 habituellement...

La roue tiendra-t-elle jusqu'au bout ? Nous sommes coincés au milieu de l'Utah, sans voiture, le prochain village est à 100 km. La situation devient tendue...