27 juin 2006

Etape 10 - Ely/Baker - 106km - deniveles positifs :1000m



Récit par Wandsel.
Réveil à 6 h 45.
Nous avons tous passés une bonne nuit au camping malgré nos craintes (voisins bruyants et panneaux publicitaires géants lumineux).
Le campement levé, nous prenons la direction du fast-food pour un petit-déjeuner bien copieux (oatmeal, pancake et oreilles de Pétuya).
Le tout avalé à une vitesse raisonnable pour une fois, nous prenons la direction du supermarché pour les provisions du midi (en prévision de 70 miles sans âmes qui vivent).
Nous voilà ventres et sacoches bien pleins, direction plein sud et une nouvelle ligne droite...
Nous avons tous en tête la journée de repos du lendemain à se relaxer dans une piscine de motel.
En attendant, le premier col se présente, l’allure est vive. Notre Miguel Indurain (Benat) et Breton impriment la cadence.
Je soupçonne Boule de préparer une attaque dans le premier col.
Dès les premiers kilomètres, nous comprenons que la montée n'est pas très raide. L'allure s'accélère, nous avalons les 8 miles du col avec une arrivée groupée au sommet.
Comme les jours précédents, nous attaquons la descente qui précède une nouvelle longue ligne droite.

Suite du récit par Francois.
Arrivés à la moitié de la plaine, un choix d'itinéraire s'impose à nous ; soit l'option route et une longue montée régulière de 12 miles ; soit une piste en terre « raccourci » qui va nous obliger à pousser le vélo. Les jeunes décident de la route pendant la pause casse-croûte (y a plus de jeunesse, ils ne veulent pas souffir).
Au pied du col l'allure s'organise doucement. Soudain Boule qui ne semble plus souffrir du genou , nous gratifie d'une attaque dont il a le secret (la plaque, le sourire provocateur). Il prend rapidement 200 mètres d'avance, le peloton monte en cadence. Wandsel décide d'accélérer (le salaud !).
À mi-col, il récupère Boule. Derrière, ça s'explique. Breton met un point d'honneur à ne pas fermer la route, il s'accroche à son guidon Jones (payé 300 dollars à Medford Oregon). Benat comme toujours monte au train. Je tombe le braquet, et enclenche mes « klinbulojambes » surpuissantes. Devant, Wandsel coiffe Boule pour les points du maillot à poids de la montagne. J'arrive devant Benat, puis c'est au tour de Breton qui souffrant du dos n'a pu suivre le rythme.
Au sommet, la vue est magnifique, nous pouvons voir les sommets enneigés du Great Basin du Nevada.

Récit par Wandsel.
12 h, il nous reste à présent une descente jusqu'à l'arrivée à Baker.
La piscine nous fait de plus en plus envie, d'autant qu'il fait maintenant très chaud.
Nous quittons la Road 50, direction le sud. Restent 1 ou 2 miles avant l'entrée en ville. L'allure s'accélère sous l'impulsion de François. Breton attaque. L'allure s'emballe. François bien calé sur sa machine envoie les watts...
Les roues vont-elles tenir ?
Boule accuse le coup et décroche. Puis c'est au tour de Breton de céder. Les Biscottes auront quand même mérités le maillot « coeur de lion » qui récompense l'équipe la plus combative.
Devant, c'est l'explication finale.

Photo finish: je devance François d'un rayon.

Voici l'heure de trouver notre motel des rêves. C'était sans compter sur la taille phénoménale de la fameuse ville de Baker : 30 habitants...
Nous n'obtenons qu'une minable chambre de motel après de longues négociations avec la doyenne du lieu (tenace) qui ne voulait pas la céder pour 5 hommes musclés.
La déco avec sa moquette des années 50 et sa clim qui fait plus de bruit qu'un Boeing 747 au décollage, nous enlève nos dernières illusions.
Anecdote marrante : sur la terrasse, alors que nous nous prélassons, soudain survient un bruit d'avion en pique (et là ce n'est pas la clim) suivi d'un bruit de fracas sourd. Un faucon lancé à plus de 200 km/h sur une proie au sol (une de nos cacahuètes ?) n'a pas vu les fils électriques au-dessus de nos têtes et se pulvérise les ailes dessus. Quelle surprise !! Nous le retrouvons KO, agonisant sur le dos, mais vivant. Il repartira quelques heures plus tard en se demandant ce qui a bien pu le priver des ces cacahuètes ! Ils sont bizarres les oiseaux du coin.
Repas grillades devant notre piaule avec 15 bières. Puis dodo dans une chambre surchauffée.








Etape 9 - Eureka/Ely - 127km

Lever 5 h, comme d'habitude. Cette nouvelle formule fonctionne bien et on en démord pas. Ce matin pourtant, il fait extrêmement froid (entre 4 et 5°C). Bien qu'étant dans le désert du Nevada, nous sommes à 2000 mètres d'altitude...
P'tit-déj cloîtré dans la salle de lessive du camping. C'est la seule piece à peu près chauffée. Les campeurs qui feront leur lessive après nous trouveront sûrement quelques traces de confiture sur leur linge, mais on a trop froid pour y penser.
L'étape débute par un col de 6 km, nous sommes contents car, par moment, le soleil apparait au detour des crêtes et nous soulage les glaçons que nous avons à la place des doigts.
Important : depuis 3 jours nous rencontrons un groupe de cyclistes chevronnés qui traverse le pays et s'arrêtent aux mêmes villes étapes. Ils ont de beaux maillots, des vélos de 9 kg (30 kg pour les nôtres), des voitures de ravitaillement, et tout le toutim.
Aujourd'hui, ils nous doublent dès 9 h 00. Après moult « hi guys, how yu doin'? », on se rend vite compte que nous les impressionnons. Pourquoi ? À plusieurs reprises, nous entendons dans leur peloton : « Look dude, here are the french guys. » Si bien qu'à chacun de leurs ravitaillements, ils se retrouvent à nous applaudir, eux les 20 suréquipés qui traversent le pays pour une oeuvre quelconque.
Bref, l'étape se poursuit. 3 cols aujourd'hui et toujours le même profil :
- ligne droite en plaine de 20 km ;
- col de 10 km.
Il fait terriblement chaud, mais l'étape, bien qu'extrêmement longue, se termine par un faux plat descendant de 25 km.
12 h 00, toujours pas de criquets. Le paysage est superbe, entre les vallées arides, désertiques et les cols aux montagnes enneigées.
13 h 00, nous franchissons le dernier col. Les 20 chevronnés qui nous ont dépassés toute la journée nous applaudissent encore une fois au sommet, avachis, prenant leur 52e ravitaillement avec leur coach, leur voiture balai, leurs panneaux d'avertissement... ils commencent à nous agacer.
Km 100, je lance une attaque dans la longue descente. Mon coéquipier (Breton) de l'équipe Biscotte me prend la roue. On se retrouve devant.
Génial !
Soudain, les 3 autres déboulent, merde... je réponds.
Dans la tourmente, nous nous retrouvons 3 à l'avant : Wandsel, François et moi lancés comme des balles.
Breton, diminué par son dos, lâche prise.
Benat bien que très courageux, n'a pas pris la bonne aspiration et se retrouve largué à son tour.
Km 105, François hausse le ton. Nous sommes à 15 km de l'arrivée et lancés a 45 km/h. Nous jouerons désormais la victoire d'étape entre nous trois.
Km 115, on se tire toujours la bourre comme si c'était le final du Tour de France. On donne tout.
Soudain 2 des 20 cyclistes chevronnés avec leurs beaux vélos light et leur bronzage ajusté apparaissent en point de mire. Notre course change d'objectif : « les gars, on se fait des relais et on met une raclée à ces play-boys du vélo. »
50 km/h avec les sacoches, c'est de la folie. Objectif : les rattraper, les doubler, les enrhumer avant l'arrivée dans Ely.
Km 120, le nez dans le guidon, le coeur à 200, on passe comme des boulets de canon à côté d'eux. On a même pas le temps de photographier la loco à vapeur pourtant lancée plein gaz. On la laisse sur place...
Au detour d'un virage, apparait enfin la ville. Il reste maintenant 500 mètres. Tout va se jouer au sprint. Des badauds nous regardent passer sans comprendre. On tuerait pour arriver 1er sur la rue principale, où une ligne de stop fera office de ligne d'arrivée.
Après un ultime sprint à plus de 50 km/h, à s'en péter les sacoches et les cuisses, François jette son vélo en avant pour nous devancer d'un boyau sur la ligne d'arrivée (en réalité, ligne de stop).
Trop occupés par notre course nous coupons la route aux voitures, devant des passants appeurés.
6 min. plus tard, Benat arrive à son tour. Il aura tout donné sans pouvoir revenir. Il est déçu.
Breton arrive peu après, déçu lui aussi de n'avoir pu participer à cette course majeure...
Bizarrement l'après-midi et la soirée se passent calmement, les jambes lourdes.
Nous buvons des bières dans un casino ou une Americaine de Chicago se fait un plaisir de nous offrir la dernière tournée, tellement contente de parler francais avec des stars du vélo !
Repas chinois pour changer des beans en boite.
Il est 20 h 30, on se couche en repensant à cette journée de fou.